Si la révision du loyer triennale est encadrée et empêche, généralement, de dépasser certains montants, il est possible, dans quelques situations précises, de procéder au déplafonnement du loyer du bail commercial. Ce mécanisme de plafonnement est en effet écarté en raison de la durée du bail ou d’une modification notable des éléments de la valeur locative.
Lors de la conclusion du bail commercial initial, les contractants déterminent librement le montant du loyer en fonction de la valeur attachée au local résultant du jeu de l'offre et de la demande.
Si à l'échéance, le bail commercial est renouvelé, le loyer est fixé en fonction de la valeur locative. Cependant, le loyer fait l’objet d’un plafonnement lorsque les conditions exigées sont remplies. Ainsi la variation du loyer reste limitée à la variation de l'indice du coût de la construction ou de l’indice des loyers commerciaux intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré. (Cf. Note sur le plafonnement du loyer du bail renouvelé).
Ce mécanisme de plafonnement est pourtant écarté en raison de la durée du bail ou d’une modification notable des éléments de la valeur locative.
Le loyer du bail renouvelé sera alors fixé exclusivement en fonction de la valeur locative des locaux loués. Cette valeur locative est déterminée selon des critères légaux. Il s’agit de la destination des lieux, des caractéristiques du local, des obligations respectives des parties, des facteurs locaux de commercialité et des prix couramment pratiqués dans le voisinage.
Durée du bail
Fait l'objet d'un déplafonnement, le loyer du bail à renouveler conclu pour une durée supérieure à 9 ans que le renouvellement intervienne effectivement à l'échéance du contrat ou plus tard après une période de tacite reconduction.
Il en est de même du bail conclu initialement pour une durée de 9 ans, mais qui, par suite d'une tacite reconduction, a été d'une durée supérieure à 12 ans.
Modification notable d'un élément d'appréciation de la valeur locative
Lorsque les éléments servant à la fixation de la valeur locative, ont subi une modification notable, le loyer est porté au montant de la valeur locative qui en résulte. Il appartient au bailleur qui réclame un loyer supérieur au loyer-plafond, d'établir le caractère notable de la modification. Celle-ci doit être intervenue au cours du bail expiré. Le cas échéant, les juges apprécient souverainement si la modification invoquée présente un caractère notable.
Une modification notable d'un seul des différents éléments constitutifs de la valeur locative examinée ci-dessous suffit à justifier le déplafonnement.
1. Modification des caractéristiques du local loué
Les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération notamment :
- de la situation dans l'immeuble ;
- de sa surface ;
- de la commodité de son accès pour le public ;
- de l'état d'entretien ;
- de l'état des équipements mis à la disposition du locataire.
A titre d'exemples constituent des modifications caractéristiques de locaux :
- l'extension des locaux par le raccordement de deux locaux distincts ;
- les travaux de rénovation réalisés par le bailleur rendant l'accès au local plus facile.
Les modifications de surface ne seront pas prises en compte si elles résultent uniquement de travaux faits par le locataire à ses frais exclusifs. Lorsqu'il n'a pas participé au financement, le bailleur ne peut pas prétendre au déplafonnement du loyer.
2. Modification de la destination des lieux
La destination des lieux est celle effectivement autorisée par le bail et ses avenants. Une déspécialisation totale ou partielle de l'activité présentant un caractère notable suffit à exclure le plafonnement. Ceci même si le locataire a réalisé des travaux d'aménagement à ses frais exclusifs pour l'exercice de la nouvelle activité.
3. Modification des obligations des parties
Une modification d'une des clauses du contrat de bail définissant les obligations des parties et mettant des obligations supérieures à la charge d’une partie ou créant des droits pour elle peut justifier un déplafonnement du loyer.
Ainsi pourra invoquer une diminution de la valeur locative le locataire qui en cours de bail s'est vu imposer par le bailleur des restrictions à la jouissance des locaux. En sens inverse, une autorisation de sous-location donnée en cours de bail peut constituer une modification notable autorisant le déplafonnement.
4. Modification des facteurs locaux de commercialité
Les facteurs locaux de commercialité dépendent de l'intérêt que présente pour le commerce l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport.
Une telle modification des facteurs locaux ne justifie un déplafonnement de loyer que si elle présente un intérêt pour le commerce exploité par le locataire.
A titre d'exemple, ont été considérées comme des modifications autorisant un déplafonnement :
- la construction à proximité du commerce de confection de plusieurs immeubles collectifs d'habitation ;
- la création d'une station de métro ou d'une zone piétonne à proximité du commerce ;
- la création d'un parking souterrain dans un quartier dépourvu de places et l'installation d'un escalator à la sortie de la station de métro débouchant juste devant la boutique.
En revanche, la modification des facteurs locaux de commercialité n'a pas été retenue comme suffisante dans les cas suivants :
- l'augmentation de population de la commune pour un commerce de location de véhicules ne s'adressant pas à une clientèle locale ;
- la rénovation de plusieurs boutiques dans un quartier qui a toujours été le centre commercial de la ville ;
- la rénovation du quartier et la création de nouveaux immeubles pour une activité d'import-export.
Remarque : Le déplafonnement est plus facilement admis lorsque la modification affecte cumulativement plusieurs éléments constituant des facteurs locaux de commercialité.
En cas de désaccord, les parties ont la possibilité de saisir la Commission départementale de Conciliation (cf. Note sur la Commission départementale de conciliation) ou de saisir le juge ( cf. note sur le règlement des litiges relatifs aux baux commerciaux).
Depuis la loi Pinel, un déplafonnement ne peut plus générer une augmentation annuelle de plus de 10% par rapport au loyer de l’année précédente. Cela permet de lisser l’augmentation du loyer sur plusieurs années,